Der Blick von Tanger nach Gibraltar

La cité est encore enveloppée d’un silence profond. Ils passent près d’un ancien cinéma en ruines, qui a gardé intacte son enseigne datant du protectorat français, comme une relique qui n’intéresse plus personne. Arrivés en haut de la kasbah, ils longent la muraille de l’ancien palais et s’arrêtent devant les tombeaux phéniciens en bord de falaise. Ils s’assoient et contemplent la mer d’encre, sombre et calme. Au loin, de nombreuses petites lumières clignotent sur la côte espagnole. Plusieurs phares jalonnent le détroit, balisant l’intense trafic maritime entre l’Europe et l’Afrique qui se densifie jour après jour, dans une valse de porte-conteneurs et cargos qui transportent autant de richesses sur leurs ponts que de misère au fond de leurs cales.

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Venedig im Frühling

Venise au printemps est une fête. Je suis arrivé, il y a quelques jours, par l’avion de 9 heures, motoscafo direct depuis l’aéroport jusqu’à San Basilio, à fond sur la lagune, baptême. Toujours le même rituel, l’eau, la vitesse, l’accélération, la brume sur fond bleu, l’horizon rose. Vous avez beaucoup ramé avant, dans l’autre monde, épuisement, découragement, mauvais vertiges, désarroi, dépit, secousses et puis voilà, le temps ouvert.

C’est la fin d’une splendide journée d’avril, le dernier soleil est orange, c’est le même que celui que Vivaldi, Monteverdi, Casanova, Titien, Tiepolo, Palladio, Véronèse ont connu. Demain, la première rosée sera tiède et salée.

Vincent Roy, Un printemps neuf (Le Cherche-Midi, 2023).

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Kurt Cobain ist tot

Smells like teen spirit démarre. Quelqu’un monte le son. On se lève tous d’un bond pour entamer un pogo furieux et chaotique. Les 10 m2 de la chambre se transforment en arène salvatrice et destructrice. On chante à tue-tête les quelques paroles qu’on croit connaître, en fermant les yeux. L’esprit adolescent est là, dans chacun de nous, il exsude de nos pores, il irradie la pièce. On est à Seattle, à Washington, à Londres ou ailleurs mais pas là, dans cette ville trop petite pour nous, insignifiante et sans avenir. On est jeunes, vivants, pleins d’illusions déjà presque perdues. On se sent forts tous ensemble, on communie dans le déluge de décibels. Une veillée funèbre grunge et désenchantée pour l’icône disparue.

Que nous reste-t-il désormais ? Le bac dans quelques mois, et après ?

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Aufblitzen im Augenblick einer Gefahr: Walter Benjamin bei Aurélien Bellanger

„Als Scholem seinen Freund 1938 nach mehr als zehn Jahren wiedersah, stellte er fest, dass sein Haar weiß geworden war und er an Gewicht zugenommen hatte. Ich kann nicht anders, als mir die groteske Figur eines Benjamin vorzustellen, der überproportional gewachsen ist und das gesamte Volumen der Nationalbibliothek einnimmt – ein Benjamin aus Pappmaché oder Wachsschmelze, der den Negativabdruck der Bibliothek bildet, aber in extremis Notausgänge aus dem Albtraum von Babel gefunden hätte, ohne sie leider für sich selbst nutzen zu können.“

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Was konnte ich noch erfinden?

Le plus compliqué, c’était de reprendre tout le processus, d’imaginer des péripéties et de faire semblant de les découvrir. Aux débuts du roman moderne, quand Cervantès écrivait Don Quichotte ou Rabelais Pantagruel par exemple, c’était dans les contes qu’on se racontait de village en village, dans les fables, dans les romans qu’on commençait à peine à lire, que les lecteurs étanchaient leur soif de récits ; c’était là que se jouaient l’affrontement du bien et du mal, la rivalité entre frères ou l’ambition dévorante – tous les grands thèmes que les romans savent illustrer et mettre en musique. L’âge d’or du roman fut aussi l’âge d’or de la presse, entre le milieu du XIXe et le milieu du XXe siècle : en Occident, la population était désormais alphabétisée et, grâce aux progrès sociaux, disposait de temps libre. Les gens étaient comme des enfants qui demandent des histoires, encore des histoires, toujours des histoires.

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In 50 m hast Du das Ziel erreicht

Tes yeux sont arrimés à l’écran. Si tu les levais, ta respiration se couperait, et tu chuterais.

La carte, elle, est accueillante. Elle indique clairement les étapes et prévient les pièges. Le point rouge te guide. Il t’a permis de prendre le bon bus, de descendre à l’arrêt adéquat. La Zone Belle-Fenestre est apparue. Tu y es entrée par une grande grille rococo, le GPS savait qu’elle serait ouverte, tu t’es avancée sur un chemin de terre de Sienne (importée d’Italie, c’était noté sur l’espace du GPS), tu as pris à droite puis à gauche, puis à gauche encore après 300 mètres. C’était facile et beau.

Si tu fais le moindre faux pas, le GPS te le signale : le point s’éloigne, le temps de trajet augmente. C’est comme si tu jouais à cache-cache niveau facile. Tu tiens la carte entre tes mains. Tu peux orienter le monde selon ta volonté.

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Wir waren nicht auf der Jagd nach Likes

La peur de perdre sa respectabilité, ça, c’est bourgeois. Au sens péjoratif du terme. Dire qu’on est un artiste et vouloir être aimé, ça n’a pas de sens. Je suis actrice. Si personne ne m’aime, je disparais. N’empêche que je n’ai jamais privilégié l’amour du plus grand nombre à ma sincérité. Je ne suis pas un soda qu’on cherche à vendre à tous les enfants. Je ne me présente pas à une élection présidentielle, que je dois gagner en séduisant la majorité des citoyens. C’est mon courage d’être sincère que je vends. D’être précisément moi, que ça te plaise ou non. Ce qui fait qu’on m’a choisie plutôt qu’une autre pour de grands rôles, ce n’est ni ma plastique ni ma diction. C’est que j’ai le cran de ne pas ressembler à tout le monde. Je prends le risque de déplaire, ça fait partie du job. Tu ne peux pas marquer les esprits si tu crains d’être qui tu es. Ce n’est pas la situation qui te rend impuissant. C’est le flip que tes voisins de palier ne te saluent pas comme un notable. Tu peux invoquer ta naissance et parler du métier de tes parents pour te victimiser et justifier ta faiblesse. Mais on sait l’un comme l’autre que c’est une excuse. Les enfants riches sont comme toi. Tout le monde veut faire de la publicité aujourd’hui. C’est-à-dire produire des messages esthétiquement cohérents et qui s’adressent au client qui les commande. Qui se foutent de la vérité. Qui ne veulent que séduire, et jamais déranger personne. Vous voulez que votre art soit pris au sérieux mais vous ne voulez pas déplaire, ni être en danger. Ce n’est même pas que ça manque de sang dans les encriers, c’est que vous voulez porter la couronne d’épines du Christ, mais sans vous égratigner le front ni porter la croix. Plus personne n’est en faveur de la provocation. Maintenant tout le monde veut être bien vu. Tout le monde veut être un bon élève. Le fameux débilos au fond de la classe, assis à côté du radiateur, qui dit des conneries pour le plaisir de foutre le bordel, n’est plus une figure populaire. Le cancre de Prévert peut aller se rhabiller – vous ne reconnaissez que le langage de l’entreprise. Sérieux, responsable, du côté de la dignité et du plus gros chiffre. La seule provocation qu’on supporte, c’est celle qui vient du pouvoir. Mais ce n’est pas marrant quand ça vient d’en haut. Foutre le bordel, c’est rigolo quand t’es un petit rat dégueulasse.

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Verheißung und Entfremdung des Fastfood

„En salle“ ist der Bereich, in dem niemand aus dem Team arbeiten möchte. Es ist der Essensbereich der Systemgastronomie – und der Titel des ersten Romans von Claire Baglin, geboren 1998. Die zwei Teile des Textes gehören auf desillusionierende Weise zusammen: Verheißung und Entfremdung, die Kindheit als Tochter eines Arbeiter-Vaters und die Jahre in einer Restaurantkette.

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rentrée littéraire
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