La cité est encore enveloppée d’un silence profond. Ils passent près d’un ancien cinéma en ruines, qui a gardé intacte son enseigne datant du protectorat français, comme une relique qui n’intéresse plus personne. Arrivés en haut de la kasbah, ils longent la muraille de l’ancien palais et s’arrêtent devant les tombeaux phéniciens en bord de falaise. Ils s’assoient et contemplent la mer d’encre, sombre et calme. Au loin, de nombreuses petites lumières clignotent sur la côte espagnole. Plusieurs phares jalonnent le détroit, balisant l’intense trafic maritime entre l’Europe et l’Afrique qui se densifie jour après jour, dans une valse de porte-conteneurs et cargos qui transportent autant de richesses sur leurs ponts que de misère au fond de leurs cales.
Kai Nonnenmacher
Venedig im Frühling
Venise au printemps est une fête. Je suis arrivé, il y a quelques jours, par l’avion de 9 heures, motoscafo direct depuis l’aéroport jusqu’à San Basilio, à fond sur la lagune, baptême. Toujours le même rituel, l’eau, la vitesse, l’accélération, la brume sur fond bleu, l’horizon rose. Vous avez beaucoup ramé avant, dans l’autre monde, épuisement, découragement, mauvais vertiges, désarroi, dépit, secousses et puis voilà, le temps ouvert.
C’est la fin d’une splendide journée d’avril, le dernier soleil est orange, c’est le même que celui que Vivaldi, Monteverdi, Casanova, Titien, Tiepolo, Palladio, Véronèse ont connu. Demain, la première rosée sera tiède et salée.
Vincent Roy, Un printemps neuf (Le Cherche-Midi, 2023).
Die Öffnung der Höhle: Pierre Michon
Nach einem Vierteljahrhundert veröffentlicht Pierre Michon auf Basis des viel gelobten Textes „La Grande Beune“ 2023 nun ein Diptychon, den Roman „Les deux Beune“, mit einem zweiten Teil des obsessiven Begehrens eines jungen Lehrers in einer Welt vorzeitlicher Höhlen der Dordogne.
➙ Zum ArtikelDie Nebelkammern des Eric Chevillard
Der jüngste Roman „La chambre à brouillard“ („Die Nebelkammer“, Minuit 2023) von Eric Chevillard gibt Anlass, die poetologische Funktion des Nebels in seinen Texten näher in Augenschein zu nehmen.
➙ Zum ArtikelKurt Cobain ist tot
Smells like teen spirit démarre. Quelqu’un monte le son. On se lève tous d’un bond pour entamer un pogo furieux et chaotique. Les 10 m2 de la chambre se transforment en arène salvatrice et destructrice. On chante à tue-tête les quelques paroles qu’on croit connaître, en fermant les yeux. L’esprit adolescent est là, dans chacun de nous, il exsude de nos pores, il irradie la pièce. On est à Seattle, à Washington, à Londres ou ailleurs mais pas là, dans cette ville trop petite pour nous, insignifiante et sans avenir. On est jeunes, vivants, pleins d’illusions déjà presque perdues. On se sent forts tous ensemble, on communie dans le déluge de décibels. Une veillée funèbre grunge et désenchantée pour l’icône disparue.
Que nous reste-t-il désormais ? Le bac dans quelques mois, et après ?
Aufblitzen im Augenblick einer Gefahr: Walter Benjamin bei Aurélien Bellanger
„Als Scholem seinen Freund 1938 nach mehr als zehn Jahren wiedersah, stellte er fest, dass sein Haar weiß geworden war und er an Gewicht zugenommen hatte. Ich kann nicht anders, als mir die groteske Figur eines Benjamin vorzustellen, der überproportional gewachsen ist und das gesamte Volumen der Nationalbibliothek einnimmt – ein Benjamin aus Pappmaché oder Wachsschmelze, der den Negativabdruck der Bibliothek bildet, aber in extremis Notausgänge aus dem Albtraum von Babel gefunden hätte, ohne sie leider für sich selbst nutzen zu können.“
➙ Zum ArtikelFamilienepos in acht Zeugungsakten: Laurent Quintreau
Laurent Quintreaus „Ève et Adam“ erzählt Familienhistorie über die kontingente Vereinigung von Sexualpartnern in acht Generationen von 1852 bis in das Jahr 2046. Dieses Epos der Zeugungen ist nicht zuletzt eine Geschichte der Geschlechter im Verhältnis der Reproduktionen.
➙ Zum ArtikelWas konnte ich noch erfinden?
Le plus compliqué, c’était de reprendre tout le processus, d’imaginer des péripéties et de faire semblant de les découvrir. Aux débuts du roman moderne, quand Cervantès écrivait Don Quichotte ou Rabelais Pantagruel par exemple, c’était dans les contes qu’on se racontait de village en village, dans les fables, dans les romans qu’on commençait à peine à lire, que les lecteurs étanchaient leur soif de récits ; c’était là que se jouaient l’affrontement du bien et du mal, la rivalité entre frères ou l’ambition dévorante – tous les grands thèmes que les romans savent illustrer et mettre en musique. L’âge d’or du roman fut aussi l’âge d’or de la presse, entre le milieu du XIXe et le milieu du XXe siècle : en Occident, la population était désormais alphabétisée et, grâce aux progrès sociaux, disposait de temps libre. Les gens étaient comme des enfants qui demandent des histoires, encore des histoires, toujours des histoires.
In 50 m hast Du das Ziel erreicht
Tes yeux sont arrimés à l’écran. Si tu les levais, ta respiration se couperait, et tu chuterais.
La carte, elle, est accueillante. Elle indique clairement les étapes et prévient les pièges. Le point rouge te guide. Il t’a permis de prendre le bon bus, de descendre à l’arrêt adéquat. La Zone Belle-Fenestre est apparue. Tu y es entrée par une grande grille rococo, le GPS savait qu’elle serait ouverte, tu t’es avancée sur un chemin de terre de Sienne (importée d’Italie, c’était noté sur l’espace du GPS), tu as pris à droite puis à gauche, puis à gauche encore après 300 mètres. C’était facile et beau.
Si tu fais le moindre faux pas, le GPS te le signale : le point s’éloigne, le temps de trajet augmente. C’est comme si tu jouais à cache-cache niveau facile. Tu tiens la carte entre tes mains. Tu peux orienter le monde selon ta volonté.
Wir waren nicht auf der Jagd nach Likes
La peur de perdre sa respectabilité, ça, c’est bourgeois. Au sens péjoratif du terme. Dire qu’on est un artiste et vouloir être aimé, ça n’a pas de sens. Je suis actrice. Si personne ne m’aime, je disparais. N’empêche que je n’ai jamais privilégié l’amour du plus grand nombre à ma sincérité. Je ne suis pas un soda qu’on cherche à vendre à tous les enfants. Je ne me présente pas à une élection présidentielle, que je dois gagner en séduisant la majorité des citoyens. C’est mon courage d’être sincère que je vends. D’être précisément moi, que ça te plaise ou non. Ce qui fait qu’on m’a choisie plutôt qu’une autre pour de grands rôles, ce n’est ni ma plastique ni ma diction. C’est que j’ai le cran de ne pas ressembler à tout le monde. Je prends le risque de déplaire, ça fait partie du job. Tu ne peux pas marquer les esprits si tu crains d’être qui tu es. Ce n’est pas la situation qui te rend impuissant. C’est le flip que tes voisins de palier ne te saluent pas comme un notable. Tu peux invoquer ta naissance et parler du métier de tes parents pour te victimiser et justifier ta faiblesse. Mais on sait l’un comme l’autre que c’est une excuse. Les enfants riches sont comme toi. Tout le monde veut faire de la publicité aujourd’hui. C’est-à-dire produire des messages esthétiquement cohérents et qui s’adressent au client qui les commande. Qui se foutent de la vérité. Qui ne veulent que séduire, et jamais déranger personne. Vous voulez que votre art soit pris au sérieux mais vous ne voulez pas déplaire, ni être en danger. Ce n’est même pas que ça manque de sang dans les encriers, c’est que vous voulez porter la couronne d’épines du Christ, mais sans vous égratigner le front ni porter la croix. Plus personne n’est en faveur de la provocation. Maintenant tout le monde veut être bien vu. Tout le monde veut être un bon élève. Le fameux débilos au fond de la classe, assis à côté du radiateur, qui dit des conneries pour le plaisir de foutre le bordel, n’est plus une figure populaire. Le cancre de Prévert peut aller se rhabiller – vous ne reconnaissez que le langage de l’entreprise. Sérieux, responsable, du côté de la dignité et du plus gros chiffre. La seule provocation qu’on supporte, c’est celle qui vient du pouvoir. Mais ce n’est pas marrant quand ça vient d’en haut. Foutre le bordel, c’est rigolo quand t’es un petit rat dégueulasse.
Vél d’Hiv als Kinderantlitz: Cloé Korman
Cloé Korman gibt drei Großcousinen ein Gesicht, die als jüdische Kinder in Auschwitz umkamen: Mireille, Jacqueline und Henriette.
➙ Zum ArtikelPerlmutt und Bataille: Yannick Haenel
„Le Trésorier-payeur“ (2022) von Yannick Haenel lässt einen Philosophen mit Namen Georges Bataille Bankier werden. Eine Ökonomie der Verschwendung und der Verausgabung, auch für die Kunst.
➙ Zum ArtikelAufblühen der Bedeutung selbst: Jean-Michel Maulpoix
Goncourt-Preisträger 2022 für Poesie ist Jean-Michel Maulpoix, mit dem jüngsten Gedichtband „Rue des fleurs“
➙ Zum ArtikelAction directe im Roman: Vanessa Schneider und Monica Sabolo
Mit Joëlle Aubron (1959–2006) in Vanessa Schneiders „La fille de Deauville“ (Grasset) und mit Nathalie Ménigon (geb. 1957) in Monica Sabolos „La vie clandestine“ (Gallimard) werden zwei Mitglieder der linksradikalen Action directe 2022 zu Romanfiguren.
➙ Zum ArtikelRussland als Albtraummaschine des Westens
Der Roman nimmt Putins Berater Wladislaw Surkow als Vorbild für seine Politfiktion, die es auf die erste Auswahlliste des Goncourtpreises geschafft hat, als Roman über das gegenwärtige Russland.
➙ Zum ArtikelStillstand und Vollendung: Jean-Philippe Toussaint
Stillstand und Vollendung: Jean-Philippe Toussaint, „La disparition du paysage“ und „L’instant précis où Monet entre dans l’atelier“. Die beiden Kurztexte sind explizite Auseinandersetzungen mit dem Sterben und dem aufgeschobenen Abschluss des eigenen Werks.
➙ Zum ArtikelVerheißung und Entfremdung des Fastfood
„En salle“ ist der Bereich, in dem niemand aus dem Team arbeiten möchte. Es ist der Essensbereich der Systemgastronomie – und der Titel des ersten Romans von Claire Baglin, geboren 1998. Die zwei Teile des Textes gehören auf desillusionierende Weise zusammen: Verheißung und Entfremdung, die Kindheit als Tochter eines Arbeiter-Vaters und die Jahre in einer Restaurantkette.
➙ Zum ArtikelKindheit zwischen den Sprachen
Aus kindlicher Perspektive ein Leben zwischen zwei Sprachen zu erzählen, diese per se poetische Erfahrung bietet uns Polina Panassenko in ihrem autofiktional grundierten Text Tenir sa langue.
➙ Zum ArtikelPoesie der Körpertechniken: Aby Warburg tanzt
Die beiden Bücher „Voguer“ (2019) und „Aby“ (2022) von Marie de Quatrebarbes lesen den Tanz der Körper poetisch. Der Beitrag deutet insbesondere den Roman über Aby Warburg als Poetisierung seiner theoretischen Arbeit als Kunstgeschichtler und Kulturwissenschaftler.
➙ Zum ArtikelFlaubert im Bade
Am 12. Dezember 2021 wurde der 200. Geburtstag von Gustave Flaubert begangen. Ganz im Sinne von Robbe-Grillet erscheint unser Autor in einer ganzen Zahl an Romanen als „Textfigur“.
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